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Biografía sucinta
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Pierre Fourier
 
 

Introduction
Pierre Fourier, dit le "Bon Père de Mattaincourt", voit le jour au siècle où l'Église catholique suscite de vives passions, né le 30 novembre 1565. Il vit dans une Lorraine prospère et indépendante et s'éteint à l'âge de 75 ans, le 9 décembre 1640, dans ce duché alors dévasté par la guerre de Trente Ans.

Enfance
À Mirecourt, cité de négoce et de robe, alors chef-lieu du bailliage de la Vosges , il passe son enfance dans une famille bourgeoise et chrétienne, à la parentèle large et variée. Anciennement d'origine paysanne, sa famille provenait de Xaronval, un petit village proche de Mirecourt. Son père Dominique Fourier, maître drapier, épouse en premières noces Anne Hacquart, la fille d'un sergent du bailli.

A partir de 8 ans
Pour compléter son enseignement paternel, Dominique Fourier envoie Pierre à l'école de la ville Citadelle de Mirecourt où il débute ses études. Très vite il affiche "ses prédispositions intellectuelles". À l'âge de dix ans, il étudie déjà la langue latine.

13 ans
À peine âgé de 13 ans, en octobre 1578, son père, Dominique Fourier, l'envoie au collège dépendant de l'université de Pont-à-Mousson, alors au service de la Contre-Réforme et aux mains des Jésuites. Pierre Fourier y poursuit ses études, prenant pension chez un bourgeois de la ville.

Élève des Jésuites
Au collège de Pont-à-Mousson, il entreprend tout d'abord ses classes de grammaire puis celle de rhétorique où il acquiert la maîtrise du grec et du latin. Il y développe sa culture littéraire et s'initie à la "dialectique", l'art d'argumentation où il excellera, comme nous le prouvent ses très nombreux écrits.

Novice
Au sortir de l'université, Pierre Fourier, alors âgé de 20 ans, ne veut point s'attacher au clergé de son diocèse natal. Il préfère la vie commune "sous le nom et la règle d'un grand évêque". En 1585, il porte son choix sur une des abbayes de Lorraine : l'abbaye de Sainte-Marie des Chanoines Réguliers de l'ordre de Saint-Augustin à Chaumousey. Cette abbaye fondée en 1094 par Séhérus d'Épinal est située à deux lieues d'Épinal et à cinq de Mirecourt. Son choix étonne son entourage car cette abbaye ne compte plus parmi les modèles à suivre : les chanoines y connaissent le relâchement de la règle mais aussi une notoire décadence. Jamais Pierre Fourrier ne pourra pour autant être assimilé à cette pléthore de prêtres et de clercs (diacres, sous-diacres, étudiants tonsurés) qui défigurèrent l'histoire du christianisme par leur ignorance et leurs mœurs grossières. D'ailleurs, il s'est toujours évertué à appliquer à la lettre sa devise inspirée de Saint Ambroise : «Ne nuire à personne, être utile à tous». Comme l'affirme Sœur Paule Sagot, sa devise est «significative de sa spiritualité, simple exigeante, réaliste. Une charité réelle et efficace …»

Le prêtre
C'est en 1587 qu'il s'engage définitivement dans l'ordre des Chanoines Réguliers par les vœux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance.
Le 24 septembre 1588, il est ordonné diacre à Trèves.
Le 25 février 1589, l'évêque d'Azot, suffragant du prince électeur de Trèves, l'ordonne prêtre après un pénible noviciat, frappé d'atteintes de toutes sortes contre sa personne.

Il ne se sent pourtant pas encore digne de sa charge, à tel point qu'il attend le jour de la Nativité (peut-être le 24 juin) pour prononcer sa première messe.

Ses doctorats
Le père abbé prend la décision de lui faire poursuivre ses études. Il le renvoie à l'université de Pont-à-Mousson afin de compléter sa formation théologique.

Là, il retrouve ses anciens professeurs, élèves et amis. Lors de ses différents séjours à Pont-à-Mousson, il côtoie l'élite intellectuelle régionale : ses maîtres, son cousin et guide spirituel, le Père Jean Fourier qui, au cours de sa seconde année de cours, prend la direction de la maison de Pont-à-Mousson, le Père Jacques Sirmond, le Père Louis Richeome, surnommé le "Cicéron français" mais également ses amis tels Servais de Lairuels, futur réformateur des Prémontrés lorrains ou encore Didier de la Cour , futur réformateur des Bénédictins de Sainte-Vanne.

Docteur Fourier
En 1595, il est licencié en théologie. Certains contemporains lui accordent même le titre de docteur.

Il sort sûrement docteur en théologie, en droit civil et canonique mais vraisemblablement, comme l'affirment bien des historiens, il "refusa par humilité et esprit de pauvreté de participer à la cérémonie solennelle qui accompagnait la collation des grades."

Procureur à Chaumousey
Au mois d'août 1595, rappelé par son père abbé, Pierre Fourier retrouve le chemin du monastère de Chaumousey.

Suite aux vœux du Cardinal de Lorraine et en vue de remédier aux abus, la réforme du monde monastique est à l'ordre du jour. Dans cette optique, le père abbé de Chaumousey nomme Pierre Fourier procureur du monastère et administrateur de la paroisse de Chaumousey qui dépend de l'abbaye.

Au lieu de vivre et d'abuser de l'opulence que lui confère sa charge, Pierre Fourier consacre son temps et les gains résultant de sa charge aux pauvres de la paroisse et aux jeunes novices du monastère. Il travaille sans relâche et ne s'accorde qu'une nourriture très frugale composée de quelques légumes, fruits secs, voire même de racines.

Irrités par un tel exemple de dévotion et de droiture, quelques frères lui font subir outrages, menaces, coups,... et n'hésitent pas, semble-t-il, à attenter à ses jours en lui versant du poison dans sa nourriture. En aucune manière, cette persécution n'entame sa patiente détermination.

La cure de Mattaincourt
Sa famille s'inquiéte bien davantage de sa situation. Ainsi, ses parents cherchent-ils des bénéfices pour leur fils. Ils en obtiennent du cardinal de Lorraine.

Pierre s'en remet à son directeur pour savoir ce qu'il convient de faire. Il accepte le plus humble des bénéfices, la cure de Mattaincourt, indépendante de Chaumousey.

Le 28 mai 1597, Pierre Fourier signe l'acte de la cure de Mattaincourt devant le notaire de Toul.

Mattaincourt n'est pas à proprement parler une paroisse matériellement misérable. Elle compte de bons laboureurs, des artisans de divers métiers et un commerce du drap qui amène l'abondance. Toutefois, comme bénéfice ecclésiastique, elle demeure une paroisse des moins intéressantes du diocèse.

Spirituellement, avec son église désertée, elle n'est pas davantage séduisante. Avec excès, on la surnomme même " la Petite Genève ". C'est de cette paroisse que Pierre Fourier prend possession le 1er juin 1597.

Par ses qualités de modèle, de prêtre, de médiateur et d'ami, il réconcilie avec la foi catholique les habitants de Mattaincourt et d'Hymont, village dépendant de sa paroisse.

Sa vie quotidienne
Il vit sans confort dans une petite cellule de son presbytère à Mattaincourt, avec pour toute décoration un crucifix et une ou deux images en papier, avec pour tout mobilier quelques misérables chaises, un banc et un lit en bois. Le banc constitue son lit habituel, sans coussin et sans drap. Le reste de la maison curiale est tout aussi démuni : on n'y trouve ni vaisselle, ni nappes,…

Dans sa cellule, il ne mange qu'une seule fois par jour, après le coucher de soleil, son labeur une fois accompli. Son repas, tout comme à Chaumousey d'ailleurs, est frugal : il se compose invariablement d'une soupe maigre aux herbes et de quelques légumes accompagnés de pain et d'eau. Il refuse même toute invitation au repas de mariage, de baptême et autres festivités laïques ou religieuses.

Son feu reste éteint toute l'année quelque soit le froid, excepté lorsque la maladie ou l'hospitalité l'exige.

La pastorale
Durant quarante ans, Pierre Fourier n'a de cesse de s'occuper de tous ses paroissiens [entre 2.000 et 3.000 âmes], jeunes ou vieux, riches ou pauvres. Pour une telle tâche, il doit se faire seconder par un vicaire soigneusement choisi.

Afin d'accomplir sa mission pastorale, Pierre Fourier s'emploie dès son arrivée à connaître tous ses paroissiens en visitant chaque ménage de Mattaincourt et d'Hymont.

Convaincu de l'ignorance religieuse de ses paroissiens, il s'ingénie à propager la parole du Christ selon les vœux de la réforme tridentine, imprégné, qu'il est, de la pédagogie jésuite et tout particulièrement inspiré par l'œuvre de Saint Augustin.

Pour répondre aux nécessités de sa mission pastorale, il met en œuvre tous les moyens dont il dispose, n'hésitant pas à innover.

En dispensant son enseignement du haut de la chaire paroissiale, il restaure la pratique dominicale.

Tout "en s'inspirant à la fois de la tradition médiévale et des pièces de théâtre pédagogiques des Jésuites", il rédige des dialogues ou des sermons adaptés à ses concitoyens sur des points de foi ou de morale. Il s'empresse aussitôt de les faire apprendre à ses jeunes paroissiens au catéchisme. À l'église de Mattaincourt, ces représentations de catéchisme théâtral par de jeunes enfants marquent bien davantage les parents.

Il organise aussi des groupes de réflexion chez ses concitoyens ou encore invite de hautes personnalités ecclésiastiques à se faire entendre à Mattaincourt.

Soulignons aussi cette sorte de compétition de la foi qu'il met sur pied. Il répartit ses paroissiens en quatre classes : les parfaits, les profitants, les commençants et la bande perdue.

Il s'attache à les aider à gravir ces échelons de la pratique et de la foi. En effet, il "oriente toujours ses paroissiens vers la pratique des œuvres", "dans une action charitable et sociale en faveur des plus pauvres de la paroisse".

Mesurant bien toute la force du visuel, "il accorde une grande importance aux solennités liturgiques.

Dans ce but, il lance une campagne d'embellissement de son église construite en 1509, en commandant à Claude Bassot, un retable représentant des scènes de la vie de Saint Èvre, patron de la paroisse.

Le rôle de l'image dans la pastorale est l'un des fers de lance de la pédagogie jésuite : «la peinture est une parleuse qui explique sans dire mot et une éloquence de montre qui gagne le cœur par les yeux» (Menestrier, Art des Emblèmes , Lyon, 1662 dans Saint Pierre Fourier en son temps , p.41)

Enfin, si tant est que l'on puisse dire enfin, il accorde une grande vénération à la Vierge. Pour propager le culte marial, il fonde des confréries du Rosaire et de l'Immaculée Conception.

En 1632, lorsqu'il se voit contraint d'accepter le généralat de la Congrégation de Notre-Sauveur, Pierre Fourier doit se démettre de sa paroisse de Mattaincourt et la confier à un autre chanoine.

Administrateur et juge
De par sa fonction de curé, il incombe à Pierre des tâches administratives et judiciaires : notamment présider devant l'église une assemblée qui nomme et surveille un maître d'école, un marguillier pour gérer les biens de l'église, un échevin, ainsi qu'un lieutenant de police.

En tant que chef de justice, c'est-à-dire juge de moyenne et de basse justice par délégation du duc de Lorraine, il tient tribunal à jours fixes. "Il ne regardait ni parenté, ni amitié, ni richesse, ni qualité de domestique ou d'étranger, se dépouillant de toute passion et pesant tout selon les lois et au poids du sanctuaire".

De plus, «Il ajoute à la charge de chef de justice sous l'autorité de Son Altesse celle de faire respecter les ordonnances ducales et la moralité, comme représentant du seigneur du lieu, le chapitre d'Haussonville.»

En tant qu'économe général, il organise le soulagement des pauvres. Il invente et met sur pied l'ancêtre de nos mutuelles : la bourse de saint Èvre, du nom du saint patron de Mattaincourt, destinée à aider les paroissiens en difficulté. Il faut savoir qu'à l'époque, tout pauvre ou individu en difficulté, est obligé de recourir à l'emprunt et se voit alors contraint d'accepter des taux usuraires, atteignant parfois 40 %. Cette situation de fait précipite sa ruine, bien plus qu'elle ne l'aide à s'en sortir.

Les temps ont pourtant changé : si la tradition chrétienne continue à interdire le prêt à intérêt, par son ordonnance de 1573, le duc de Lorraine, Charles III, légalise le prêt mais en fixe le taux à 7 %, modérant ainsi le système jusque là en vigueur. Ce n'est assurément pas suffisant pour des gens en grandes difficultés financières. C'est pourquoi, Pierre Fourier met sur pied la première Caisse de prévoyance et de crédit mutuel, réunissant les fonds nécessaires à sa survie par le biais de dons, de legs, voire d'amendes. Elle fonctionne selon deux préceptes chrétiens : «Prêtez sans usure !» et «Prêtez sans espoir de restitution».

Sa réputation grandit
Le résultat de toute la politique de Fourier est édifiant, à tel point qu'un évêque de Toul écrivant une lettre au Saint Pontife affirme que Mattaincourt "semble être devenu un véritable monastère par l'ordre et la piété qu'on y remarque" (Source Piart, l. II).

La réputation du curé de Mattaincourt dépasse alors les limites de sa paroisse à tel point que des étrangers de toute condition, paysan ou noble, viennent écouter les sermons et les catéchismes du curé.

Même à la cour, Pierre Fourier est vénéré comme curé de Mattaincourt.

Son projet scolaire
Pierre Fourier est consterné par l'enseignement de son temps : il existe trop peu d'écoles, quand elles ne sont pas payantes ou mixtes. C'est d'ailleurs le cas de l'école de Mattaincourt. Payante, son accès reste fermé aux pauvres. Mixte, les jeunes filles supportent l'inconvénient d'une éducation masculine quelles que soient les compétences de l'homme qui les enseigne.

Ainsi souhaite-t-il l'établissement de deux ordres religieux : l'un consacré à l'éducation des garçons, l'autre des filles.

Sa première tentative à Mattaincourt avec des frères est un échec. Par contre, pour l'éducation des filles, sa rencontre avec Alix le Clerc va donner naissance à la congrégation enseignante Notre-Dame.

La Congrégation Notre-Dame
Arrivée à Hymont en 1595, Alix est poussée par des inspirations divines à "faire une nouvelle maison de religieuses où l'on pratiquerait tout le bien que l'on pourrait". Consulté par la jeune fille, Pierre Fourier lui conseille d'abord d'entrer dans un monastère déjà bien établi plutôt que de tenter d'en ouvrir un nouveau dont on ne pourra garantir l'avenir.

Mais les propos pleins de bon sens du curé de Mattaincourt ne peuvent détourner Alix de sa ferme résolution. Elle est rejointe dans son projet par Gante André, la fille d'un négociant de Mattaincourt, âgée de 18 ans. Peu après, trois jeunes autres filles s'adressent à Alix : elles s'appellent Isabeau de Louvroir, 16 ans, Claude Chauvenelle, 19 ans et une certaine demoiselle Barthélemy.

Les cinq jeunes filles se mettent à veiller les malades, instruire les pauvres,… C'est ainsi que Pierre Fourier les autorise à se présenter à la messe de minuit de l'an 1597 revêtues d'une sorte de costume de religieuse : robe noire d'étoffe commune, voile du même genre. Elles reçoivent une place d'honneur et communient les premières.

Alix considérera toujours cet acte comme la naissance de la congrégation Notre-Dame (Cf. Relation).

La congrégation n'est pourtant pas encore officiellement reconnue. Pour se faire légitimer, il lui faut bousculer les mentalités (notamment : "Comment concilier pour des religieuses l'enseignement et la chasteté ?") et franchir les nombreuses embûches dressées contre elle.

Dans la nuit du 20 janvier 1598, Pierre Fourier entrevoit la fondation du nouvel Ordre et s'engage à y travailler de toutes ses forces.

La première école créée à Mattaincourt est transférée à Poussay. En effet, le 20 mai 1598, Alix et ses compagnes se rendent chez les chanoinesses séculières de Poussay, afin de se familiariser à la vie commune et de se former à l'éducation, bien décidées à créer leur propre congrégation.

Là, grâce à l'aide bienveillante des chanoinesses, la première communauté de la Congrégation Notre-Dame naquit. Le 22 juillet 1599, elles quittent Poussay pour Mattaincourt. Désormais, elles s'adonnent à l'éducation des jeunes filles : elles leur enseignent l'orthographe, la lecture, l'écriture, "à chiffrer", les "petits travaux qui conviennent à leur sexe" ainsi que la foi chrétienne. ( Cf . Soeur P. Sagot)

Avant tout, Pierre Fourier prend soin de parachever leur formation intellectuelle encore incomplète.

En 1602, Madame d'Apremont, Dame chanoinesse de Poussay, leur apporte une aide décisive en leur faisant don de son hôtel particulier de Saint-Mihiel alors que Pierre Fourier obtient du prince Érric de Loraine, évêque de Verdun, l'autorisation d'y installer ses filles.

L'année suivante, le cardinal Charles de Lorraine garantit à Fourier sa protection à l'égard de la congrégation Notre-Dame pour toute l'étendue de sa légation. Ainsi voient le jour les premières écoles gratuites de Lorraine.

En 1617, l 'évêque de Toul approuve les Premières Constitutions. On les appellera Petites Constitutions pour les distinguer des Grandes Constitutions rédigées par Pierre Fourier l'année de sa mort en 1640.

En 1617, on essaie de reprendre dans ces Constitutions ce que l'on a perdu par les bulles.

Alix Le Clerc est la première supérieure élue. Elle prend l'habit en novembre 1617 et fait profession religieuse le 2 décembre 1618.

«Le développement de la Congrégation Notre-Dame en Lorraine est l'un des éléments significatifs du mouvement religieux féminin apparu depuis le Concile de Trente. Il prend la suite de la création en 1535 des Ursulines par Angèle de Merici soutenue par Charles Borromée. En France, en 1633, Vincent de Paul (1581-1660) fonde avec Louise de Marillac, la Congrégation des filles de la Charité dont l'action est davantage hospitalière.»

La réforme des chanoines
Mais Pierre Fourier va devoir gérer une autre congrégation. En 1622, l 'évêque de Toul, Monseigneur Jean des Porcellets de Maillane, digne successeur du cardinal Charles de Lorraine, est nommé par le pape visiteur général des chanoines réguliers de Lorraine.

Il reçoit en commende l'abbaye de Saint-Pierremont afin d'en faire le premier centre de la Réforme.

Ainsi dans le cadre de la réforme monastique des chanoines réguliers de Lorraine, Monseigneur de Maillane charge le curé de Mattaincourt d'ébaucher les constitutions d'une nouvelle congrégation et de former les chanoines qui se présenteront librement à lui.

La réforme est proposée aux anciens et aux nouveaux chanoines. Si les anciens ne l'acceptent pas, ils recevront une pension. L'évêque de Toul et le curé de Mattaincourt espèrent voir la réforme s'étendre et gagner rapidement toutes les abbayes.

Une nouvelle Congrégation est fondée pour repartir à neuf. On convient que les chanoines de la congrégation de Notre-Sauveur "s'adonneront à une large action apostolique", selon la règle de Saint-Augustin : ils lancent des missions, ouvrent des petites écoles, enseignent le catéchisme et servent d'appui à la congrégation Notre-Dame.

Reconnaissance officielle des congrégations
La congrégation de Notre-Sauveur obtient son premier bref d'approbation en novembre 1625. Elle réforme dès lors en profondeur la vie religieuse des chanoines réguliers de Saint-Augustin en introduisant de nouveaux chanoines dans les abbayes lorraines qui ont bien voulu les accueillir.

Quoiqu'en perpétuelle expansion par ses nouvelles fondations, la congrégation Notre-Dame manque de bases juridiques. Il lui faut conquérir une bulle pontificale qui accordera la reconnaissance de tous ses monastères présents et à venir, des écoles externes, et qui autorisera les maisons non fermées. Seul le monastère de Nancy a été jusqu'ici reconnu dans ce droit.

Les intrigues du duc Charles IV de Lorraine contre la France aggrave encore la situation des religieux envoyés à Rome pour négocier les affaires des deux congrégations.

En 1628, le P. Guinet parvient à obtenir du pape Urbain VIII une bulle unique pour tous les monastères existants et la reconnaissance des chanoinesses régulières de Saint-Augustin ainsi qu'une autre qui confirme la Congrégation de Notre-Sauveur.

Les deux bulles sont datées du 8 août 1628.

Tout à sa joie et après les avoir respectueusement déposées sur une nappe, Pierre Fourier s'exclame : «Si nous avions de la soie, du velours, de l'or ou quelque chose de plus précieux, il serait employé à cela; encore ne saurions-nous recevoir un présent qui nous est fait par une personne si digne que le Vicaire de Jésus-Christ avec l'honneur et le respect qu'il mérite, et il faudrait la pureté d'un ange pour manier ce parchemin où sont contenues les paroles du Père commun des fidèles et du Souverain Pontife de l'Église de Dieu.»

Les récalcitrants
Très vite les hauts dignitaires ecclésiastiques craignent pour leur autorité. À l'unisson, évêques et cardinaux de France et de Lorraine protestent de leur juridiction contre ce parchemin, n'hésitant pas à y ajouter des formules contraires aux canons de l'Église.

Leurs desseins sont clairs : il faut impérativement soumettre les religieuses à la plus stricte obéissance aux autorités ecclésiastiques.

Aussitôt Pierre Fourier s'ingénie à réfuter tous les articles des évêques. Il leur envoie des lettres officielles sur les "intentions des religieuses". Il y passe ses nuits.

La sorcellerie
Le curé de Mattaincourt rencontre aussi d'autres difficultés. Il a à prendre soin des"maléficiés" de sa paroisse qui sont nombreux et menacés d'être soumis à la question et, pour un certain nombre d'entre eux, livrés aux flammes du bûcher.

Il en est profondément affecté (document : 16 janvier 1620 Nancy). Reconnaissant l'existence du Malin, il se refuse d'intervenir dans les nombreux procès de sorcellerie lorrains. Il prie.

Toutefois, il tente d'inciter les juges à la clémence, sans résultat pour une vingtaine de ses paroissiens inculpés. S'il s'est souvent questionné sur les procédures, il s'est toujours refusé de porter une quelconque atteinte à l'indépendance du bras séculier.

La peste
Ce fléau frappe alors toute la Lorraine , et Mattaincourt en 1632.

À Mattaincourt, Pierre Fourier impose immédiatement des mesures draconiennes pour enrayer net l'épidémie.

Le 20 septembre, il écrit aux religieuses de Bar et aux religieuses de Châlons : "Mataincourt est infecté, mais on a mis si bon ordre dès le commencement de six ou sept maisons qui ont été les premières atteintes, que l'on espère que le mal ne passera plus outre. Néanmoins les pauvres habitants y tremblent tous de crainte sur l'incertitude de ce qui leur peut arriver. [...] On se porte bien au reste par deçà."

Le mal semble alors épargner la bourgade.

Par ailleurs, Pierre Fourier qui avait refusé à l'origine la charge de général de la Congrégation de Notre-Sauveur, doit l'accepter en 1632.

En effet, le 20 août, malgré ses protestations, il est élu à l'unanimité à la tête de la congrégation pour remplacer le P. Guinet, son ami emporté par la peste alors qu'il se dévouait auprès de pestiférés.

La simonie
À l'extérieur de sa paroisse, Pierre Fourier a aussi, en réformateur qu'il est, à combattre la simonie de son temps jusqu'au sein de la maison ducale.

Il s'irrite entre autres des intrigues menées pour assurer de riches bénéfices au jeune prince Nicolas-François à qui il fait la leçon. À ce jeune prince âgé de 18 ans, venant juste d'être nommé cardinal, il dit en substance : «Monseigneur, tout le public se réjouit de l'honneur qui vous est fait. Mais nous nous contentons de prier Dieu et nous ne ferons rien d'autre jusqu'à ce que nous apprenions que vous avez répondu à ce que l'Église attend de vous.»

La franchise de Pierre n'éloigne la famille ducale du curé de Mattaincourt. Au contraire, ils lui accordent beaucoup d'affection et bien du crédit. Charles IV dit d'ailleurs un jour : «ne se pas soucier si tous les autres le quittoient pourveu qu'il ait pour luy le Père de Mattaincourt.»

A multiples reprises, Pierre s'indigne des gros revenus prélevés sur des abbayes. Sur l'une d'entre elles, le commendataire, Charles de Remoncourt, fils naturel du duc Charles III et abbé de Gorze, s'octroie une pension de cent écus, alors que le prince Nicolas-François, par l'intermédiaire de son père, prélève les plus gros revenus.

Ainsi s'adresse-t-il, le 24 mai 1626, aux chanoines de Verdun : «C'est un tourment indicible que de traiter de ces séparations de tables. [...] Vous ne sauriez croire la peine. Ces commendataires, leurs officiers, leurs conseillers, crient et tempêtent contre les pauvres religieux et seraient contents qu'ils ne mangeassent que des croûtes moisies. Recommandez à Dieu ce Belchamps en vos saintes prières.»

Le respect du prince
À la lecture de son courrier et de ses biographes, force est de constater que la personnalité de l'humble curé de Mattaincourt en impose. Nombre de princes, seigneurs, gentilshommes de la cour ou des cités, et grands personnages influents viennent à sa rencontre. Toujours il entretiendra ses princes avec sincérité. Jamais il ne souffrira de trahir leur confiance.

Guide spirituel des grands, il parvient à avoir une grande influence politique sans avoir jamais occupé un poste de commande.

Face aux violations successives des traités de Vic puis de Liverdun (16 juin 1632) par Charles IV, Louis XIII marche en personne sur la Lorraine. Charles IV doit consentir à remettre au roi de France Nancy : le 24 septembre, les Français entrent dans la capitale. Richelieu qui ambitionne d'annexer la Lorraine cherche à rencontrer Pierre Fourier dont il n'ignore pas l'influence sur les grands de la cour ducale.

L'entrevue de 1633 entre les deux hommes ne comble pas vraiment les attentes du cardinal. Pierre Fourier reste intraitable, toujours loyal envers ses ducs et soucieux de préserver l'indépendance de la Lorraine. Richelieu représente à ses yeux une politique machiavélique défendant des ambitions temporelles nationales, sans réel idéal religieux.

La France a alors pour alliés les Suédois, les princes protestants allemands. Charles IV, lui, reste fidèle à la cause catholique et s'allie naturellement à l'empereur. C'est notamment pour cette raison que Pierre enseigne le respect du prince à ses ouailles autant qu'aux religieux et religieuses.

Lors d'une entrevue, le 6 janvier 1634, dont l'entretien reste secret, il semble que ce soit P. Fourier qui parvient, par ses conseils à Charles IV à contrarier les desseins du cardinal de Richelieu. Le cardinal attend en effet que la dynastie ducale s'éteigne afin d'imposer à la Lorraine , peut-être par une politique matrimoniale, qu'elle devienne une terre de France.

Il faudra pourtant plus d'un siècle pour que la Lorraine devienne une province française.

Le 19 janvier, Charles IV abandonne son titre à son frère, le cardinal Nicolas-François, qui n'est pas encore dans les ordres. Par un mariage avec sa cousine germaine, Claude, et après avoir remis son chapeau de cardinal au pape, la succession sera assurée à la maison ducale.

Le cardinal de Richelieu tente en vain d'empêcher le mariage.

Le 17 février 1634, vers 22 heures, tandis que les troupes françaises cherchent à investir Lunéville où se trouve le futur couple, Nicolas-François et Claude se marient au château avec la bénédiction des chanoines réguliers de Saint-Remy.

De ce mariage naquit Charles V, père de Léopold Ier et aïeul de François III, dernier prince de la maison ducale.

Les congrégations en péril
Si l'avenir de la Lorraine ducale est sauf, dans l'immédiat, la guerre, menée par les troupes impériales et ses alliés croates, frappe durement les maisons de la congrégation. Bien des chanoines réguliers ont dû fuir ou sont morts et les religieuses de Notre-Dame se disposent à s'expatrier.

La Lorraine est accablée par les horreurs de la guerre : la famine, les épidémies gagnent chaque jour du terrain.

Pour vaincre la résistance opposée par les Lorrains, la France a chargé un conseil souverain, installé à Nancy, d'exiger de toutes les classes de la société, en particulier des membres du Parlement, de la noblesse et des dignitaires ecclésiastiques, de prêter un serment de fidélité au roi.

Bien entendu, tous les partisans du duc sont activement recherchés, et à ce titre également le général des chanoines réguliers. C'est pourquoi Pierre Fourier, après un court passage à Saint-Mihiel et Pont-à-Mousson, rentre à Belchamps, où les Français opèrent une perquisition sans résultat. Il lui faut de toute évidence consentir à émigrer s'il ne veut pas voir sa congrégation passer sous la domination française.

L'exil
Le 12 avril 1636, accompagné de son jeune valet Nicolas Demandre et du P. Terrel et de 14 religieuses de Mirecourt, il gagne le château de Pesmes, situé à vingt kilomètres au delà de Gray, invité par son propriétaire Charles de La Baume.

À peine y fut-il installé avec les religieuses de Mirecourt que, sans déclaration de guerre, les forces de Condé, commandant des troupes françaises, entrent dans la Comté par Pontarlier pour s'opposer aux troupes impériales. Philippe IV, roi d'Espagne et fervent représentant de la cause catholique, exerce alors sa souveraineté sur la Franche-Comté , territoire soumis aux Habsbourg espagnols.

Aussitôt, Pierre Fourier et ses religieuses se retranchent à Gray.

Durant quatre ans, la ville va résister aux attaques ennemies.

À Gray, où il pense ne séjourner que quelques temps, «trois mois au plus», il dépense comme à son habitude une grande énergie à conseiller, à secourir les uns et les autres, les plus hautes personnalités comme les démunis. Comme toujours, en pareille époque, on cherche à renouer avec Dieu. Ainsi, du magistrat au domestique, on s'empresse de consulter le «Bon père de Mattaincourt».

La Comté ravagée
Là, Pierre Fourier revit toutes les atrocités vécues en Lorraine : la peste, la famine et bien d'autres abominations.

Un hagiographe de Pierre Fourier, le R. P. Dom J.-B. Vuillemin dit que : « les historiens craignent de les [= atrocités] publier parce qu'ils ne seraient pas cru.»

Ainsi on rapporte qu'on vit, en 1636, "des femmes réduites à la dure nécessité de manger leurs propres enfants pour ne pas mourir de faim, s'entredisant l'une à l'autre : aujourd'hui je mangerai la part du tien, et demain tu auras aussi part au mien". Ainsi encore, par exemple, en 1638, "on surprit six personnes, femmes, filles et enfants, en train de dévorer un cadavre sous les arcades du pont de Gray."

La situation est vraiment dramatique : «celui-là, écrit Pierre Fourier, que vous appelez général (qui ne mérite aucunement ce nom) est en un pays étrange, où toutes choses sont extrêmement chères. La livre de pain bis s'y vend cinq gros de votre pays, un œuf quatre gros, une petite poitrine de mouton trois francs, un gigot six ou sept francs, et tout le reste des vivres à l'équipollent [à l'équivalent], si bien que ce pauvre misérable général (que vous nommez ainsi) y est bien ennuyé. Il croit manger du pain pour dix gros par jour, et toutes les fois qu'il passe par la rue pour aller dire messe, il rencontre quantité de pauvres malades languissants de faim, les uns couchés sur le pavé tout nu, les autres sur un peu de paille, et souvent des morts qui ont expiré la nuit sans assistance de personne ni consolation quelconque (car on y craint la peste). À ces piteux spectacles qui sont quotidiens, il s'afflige, voyant qu'il ne peut les soulager en aucune façon, et rentrant en soi-même, il s'assure et se résout et se prépare et se condamne même à passer quelque jour par les mêmes détresses, croyant qu'il l'a mieux mérité million de fois que ces pauvres gens-là […] et que la grande cherté et présente et prochaine, et le manquement d'or et d'argent pour acheter du vivre l'auront bien facilement et bientôt mis dans ce piteux état. Il ne voit d'autre moyen d'y échapper qu'en sortant du pays où il est.»

Les nouvelles de Lorraine
La Lorraine est dévastée, pillée. La détresse y est telle qu'on rapporte que Saint Vincent de Paul, en 1640, s'est jeté aux pieds de Richelieu en le priant : « La Paix ! Monseigneur, la paix ! Ayez pitié de nous, Monseigneur ! Donnez la paix à la France !.»

Les nouvelles qui parviennent à Pierre Fourier de la Lorraine , de ses congrégations et de ses paroissiens ne sont guère plus encourageantes. Ces malheurs affectent les gens qui lui sont si chers qu'il écrit à ses paroissiens : «Sont quarante ans et davantage que je pleure avec vous quand je vous voids pleurer […] Mais je ne me souviens pas que, dans toutes les affaires les plus cuisantes qui ont heurté votre pauvre commune, j'aye ressenti une telle detresse et versé tant de larmes […] comme j'ay faict, ceste fois, en lisant vos deux lettres… Mon Dieu ! Mes chers amis, que je vous plainds et qu'il m'est faict mal de vous sentir ainsy.»

La fin
À Gray, dernière terre d'accueil, Fourier a reconstitué un "petit Mattaincourt".

Comme toujours, malgré la guerre et son cortège d'horreurs, il s'applique à tous les devoirs de sa charge de général, de fondateur, de prêtre et d'homme.

Malgré son grand âge et ses multiples blessures, il s'impose une discipline de vie très austère. Il n'accepte, comme à son habitude, aucun confort : il ne veut ni chauffage, ni lit confortable; il n'accepte qu'un seul repas constitué d'uniques légumes...

On rapporte qu' «À force de macérations, il a fini par creuser dans son dos deux plaies profondes qu'on ne découvrira qu'après sa mort, ainsi que la plaie de sa jambe gauche, jamais bien refermée.»

Pierre Fourier avoue lui-même au Père Gauthier, le 4 février 1639 : «Je n'ai encore obtenu de Dieu que j'aille parmi la ville sans m'appuyer sur un bâton qui me porte comme un pauvre mendiant qui n'en peut presque plus, quand je vais dire la messe. Je crois, mon Révérend Père, que si nous étions maintenant proches du Carême prenant, ceux qui me voient boitoyer par la rue et porter mon manteau et mon bâton de si mauvaise grâce, suivi d'un petit garçonnet qui a les mules aux talons et porte ses deux pieds en écharpe, diraient justement que nous allons tous deux en mascarade.»

Comme dans son ancienne paroisse, il organise, en juillet 1640 et à la demande de magistrats graylois, un collège où il se fait l'aide de deux chanoines tout spécialement venus de Lorraine.

Traqué par la police de Richelieu, malheureux de son éloignement, Pierre pense cependant que :«Les affaires réussissent bien plus heureusement qu'elles ne feraient si j'étais présent par-delà [en Lorraine] pour y entremêler quelque chose de mien.»

Il continue pourtant à diriger, comme à son habitude, ses deux congrégations. À Gray, il rédige les constitutions définitives des Sœurs de Notre-Dame, dites les «Grandes Constitutions».

Le 12 octobre 1640, il est pris par la fièvre. Il a juste le temps de parachever les constitutions de 1640 et de rédiger quelques lettres, «pièces constitutives de son testament spirituel».

Le jour de sa mort, le 9 décembre 1640, il remet au Père Georges le manuscrit des Constitutions à l'intention des sœurs de Notre-Dame et au Père Bedel ses six derniers «beaux avis» à l'intention des chanoines de Notre-Sauveur : «Gardez toujours une vraie charité mutuelle. Pratiquez l'humilité. Procédez entre vous avec une grande franchise et cordialité. Recherchez l'intérêt commun plutôt que le vôtre particulier. Ne faites rien sans conseil. Recourez à la prière avant la moindre de vos entreprises.»

Vers 10 heures du soir, alors qu'il reçoit les derniers sacrements, Pierre Fourier expire.

«C'est alors qu'au milieu de la nuit, les sentinelles sur le rempart voient s'élever dans le ciel une lueur qui se dirige vers la Lorraine.»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S. Gilson

 

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